Des victimes de l’esclavage aux noms de la liberté
3 février 2021
Deux modalités de participation
Sur place : Archives nationales, 59 rue Guynemer à Pierrefitte-sur-Seine – Métro : SaintDenis Université (Ligne 13)
À distance : lien obtenu sur inscription (voir ci-dessous)
Le 27 avril 2018, à l’occasion de la cérémonie célébrant le 170e anniversaire de la signature par le
gouvernement provisoire de 1848 du décret d’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises, le
Président de la République écrit : « Je souhaite aussi que la République se souvienne des esclaves euxmêmes […]. Pour que jamais ne s’efface leur souffrance, je soutiens le projet d’ériger à Paris, dans le
jardin des Tuileries, un mémorial national qui rende hommage à ces victimes, comme le demandent
légitimement plusieurs acteurs de cette mémoire ». Le 10 mai 2018, le Premier ministre, Édouard
Philippe précise la nature de la proposition en déclarant : « dès lors, graver dans la pierre la dignité de
la personne humaine sera l’objectif du Mémorial qui recensera les quelque 200 000 noms donnés aux
esclaves des colonies françaises en 1848 et dans les années qui ont suivi ».
Désignés par un simple prénom ou un surnom, ils obtiennent un état civil complet en se voyant
octroyé un nom patronymique. L’opération qui devait durer deux mois s’étendra sur une
vingtaine d’années. Ainsi, à partir de 1848, ce sont plus de 200 000 nouveaux libres qui
reçoivent un patronyme. Environ 80 000 patronymes différents ont été inventés par des officiers
d’état civil, avec un système de noms varié à l’infini : interversion des lettres de mots pris au
hasard, anagramme du prénom, noms empruntés à la culture classique, noms de lieux ou de
peuples, noms issus de la description morale ou physique ou du métier du nouveau libre, etc.
La proportion des noms ridicules ou difficiles à porter est faible (il faut noter que ces
patronymes difficiles à porter existent aussi en France).
Ces noms par leur variété représentent une sorte de tout-monde, dès le milieu du XIXe
siècle.
L’objectif de ce colloque est de présenter au grand public :
• l’histoire de la nomination des nouveaux libres dans les sociétés françaises postesclavagistes,
• les sources et les acteurs de la saisie des noms des nouveaux libres,
• la politique mémorielle qui sous-tend la réalisation de ce mémorial,
• le mémorial national ainsi que le mémorial virtuel qui l’accompagne.
10h Ouverture
10h10 Introduction
« D’esclaves à citoyens : évocation du contexte de l’esclavage dans les colonies françaises et
son abolition »
par Frédéric Régent, missionné par M. le Premier ministre comme conseiller scientifique du
projet du Mémorial des Tuileries
10h30 Table ronde
Le processus d’attribution des noms en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à la
Réunion : les documents des archives
Le décret du 27 avril 1848 fait de plus de 70 % des Guadeloupéens, des Guyanais, des
Martiniquais et des Réunionnais, des citoyens français. Cette première table-ronde s’intéressera
aux modalités d’élaboration et de conservation des registres des nouveaux libres ou
d’individualité.
Intervenants
Benoît Jullien, directeur des Archives départementales de la Guadeloupe
Georges Rech, directeur des Archives territoriales de Guyane
Karole Fontaine, directrice des Archives territoriales de Martinique
Damien Vaïsse, directeur des Archives départementales de la Réunion
Modérateur
Vincent Cousseau, maître de conférences, Université de Limoges
12h Débat / questions
12h15-13h45 Pause
13h45 Table ronde
Le travail des associations, des généalogistes et des chercheurs pour saisir les noms de la
liberté
Le recueil des noms a été un des moyens utilisés comme outils pour inverser le stigmate de
l’esclave. Si la mise en valeur des combattants (Toussant Louverture, Delgrés) ou d’écrivains
célèbres (Alexandre Dumas) peut aider à cet objectif, la réhabilitation de la mémoire des
esclaves eux-mêmes est le moyen qui a démontré l’efficacité la plus grande. Le travail de
mémoire effectué à partir des registres de nomination a montré qu’il était possible d’utiliser les
archives de la période esclavagiste pour construire une mémoire apaisée et positive de cette
période.
Intervenants
Alex Bourdon, président de l’AMARHISFA (Association Martiniquaise de Recherche sur
l’Histoire des Familles)
Gilles Gérard, anthropologue de la Réunion
Jean-Yves Prudentos, CM98, Guadeloupe
Kristen Sarge, collectivité territoriale de la Guyane
Modératrice
Dominique Taffin, directrice de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage et de ses
abolitions
15h15 Débat / questions
15h30 Grand témoignage
« Un Mémorial aux victimes de l’esclavage : quels objectifs ? »
par Serge Romana, membre du comité d’orientation du Mémorial
16h Table-ronde
La nécessité d’un mémorial des victimes de l’esclavage
Grâce au travail considérable de recherche en archives et de documentation réalisé par les
acteurs de la mémoire et les chercheurs, les noms et prénoms des nouveaux libres sont destinés
à être inscrits de manière permanente dans l’espace public, sous une forme et selon des
modalités à concevoir par l’artiste qui sera retenu. Ces noms, différents de ceux des maîtres,
attribués par des officiers d’état civil, constituent un symbole fort de leur entrée dans la
citoyenneté.
La mise en valeur de ces noms, aujourd’hui portés par des millions de Français, facilitera
l’affiliation de ces derniers à leurs aïeux. Ces noms exposés permettront à tous de se souvenir
et de rendre hommage à ces hommes et à ces femmes qui ont souffert de l’esclavage.
Le projet de Mémorial est le résultat d’un travail de mémoire développé depuis la marche du
23 mai 1998. Celui-ci a comme objectif d’inverser la valence du stigmate de l’esclave pour
combattre une mémoire triste de l’esclavage, une mémoire pleine de ressentiment. Un de ces
axes forts est la construction de monuments portant les noms des esclaves exhumés des archives
après un travail de plus de 20 ans réalisé par quelques associations mémorielles. De tels
monuments de ce type ont éclos depuis 2013 en région parisienne, en Guadeloupe, en Guyane
et en Martinique. La profonde émotion qui accompagne les cérémonies d’hommage aux
esclaves autour de ces monuments, les longues files des descendants qui « viennent retrouver
le nom de leurs aïeux » lors de ces cérémonies, démontre à quel point ceux-ci servent le
traitement de la honte de l’origine servile et de la désaffiliation des descendants à leurs aïeux.
L’édification du mémorial national des victimes de l’esclavage dans les jardins des Tuileries
devrait permettre d’amplifier ce travail mémoriel. Il devra être un outil de dialogue avec
d’autres lieux de mémoire comme les vestiges des plantations, les ports négriers ou les sites de
la route des abolitions.
Intervenants
Sonia Chane-Kune, essayiste, membre du comité d’orientation du Mémorial, Réunion
Emmanuel Gordien, président du CM98
Marie-José Alie-Monthieux artiste et écrivaine, membre du comité d’orientation du Mémorial,
Martinique
Jacqueline Zonzon, responsable de l’association des professeurs d’histoire-géographie de la
Guyane
Modérateur
Frédéric Régent, conseiller scientifique du projet du Mémorial des Tuileries
17h30 Débat / questions
Conditions d’inscription
La participation au colloque est gratuite.
Inscription :
- pour une participation sur place : https://bit.ly/3I699jU
- pour une participation à distance : https://bit.ly/3I691Rs
Sur place : passe sanitaire / vaccinal demandé, selon les dispositions en vigueur le 3 février.